mardi 3 mai 2011

Choisir un chat


« Oui, ma chérie. On attend Papa, et puis on va choisir un chat. »
En entendant cette réponse d'une maman à la question posée par sa fille, je me suis dit : « Choisir un chat ? Rien que ça ? »
Parce que, souvent, on va choisir un animal de compagnie (chien, chat, lapin, hamster, cochon d'Inde, conjoint...) en se fiant qui à son instinct, qui à ses goûts, qui à sa bonne étoile, qui au vendeur, qui à l'oncle Ernest ou à la cousine Berthe, qui à son bon cœur...
Mais un chat ! Choisit-on vraiment un chat ? Et tout d'abord, y a-t-il animal de compagnie plus inutile qu'un chat ? Deux chats, oui, bien sûr, mais c'est un peu facile, comme réponse. Alors, voyons d'abord ce que représente vraiment un chat. Parce que si certains prétendent que le cheval est la plus belle conquête de l'Homme et le chien son meilleur ami, que penser de ce scrogneugneu de chat ? Ou de cette enfoirée de chatte ? Parce que l'un ou l'autre...
Appelons un chat un chat ; et une chatte un chat aussi, pour la facilité. Et décrivons les principales caractéristiques de l'animal.

Le chat est paresseux.
Ben oui. Plus partisan du moindre effort qu'un félin, c'est difficile à trouver. Bon, si le léopard ou la lionne ne se magnent pas un peu le train pour chasser, ils feront ceinture ; mais ça ne les empêche pas de roupiller quinze à vingt heures par jour. Alors, la boule de poils qui se vautre dans le meilleur fauteuil ou dans le lit de bébé (f... le camp, sale bête, on te l'a déjà dit !) et qui reçoit sa gamelle deux fois par jour, vous croyez qu'elle va secouer ses neurones ? Ce feignant se réveille deux fois par jour, donc, en s'étirant, et vient se frotter à vos chevilles en miaulant ou recouper vos pas au moment où vous trimbalez quelque chose d'encombrant qui vous empêche de voir où vous posez les pieds (nom de D... de chat ! Tu veux que je tombe ?)
Et à quelle heure ? Une heure avant l'heure de la gamelle, en général. Sauf au moment où on passe à l'heure d'été : là, il n'a que quarante minutes d'avance. Il a failli être pris de court, mais votre attitude lui a indiqué qu'il devait être en retard. Houla !
Par contre, au passage à l'heure d'hiver, vous en avez pour une semaine à supporter ce parasite en avance de deux heures. Et vous craquez. Pour avoir la paix.

Le chat n'obéit pas.
Mieux : il désobéit. Parce que non seulement ce corniaud refuse de faire quoi que ce soit pour se rendre utile ou pour suivre vos injonctions ; mais dès que vous tournez le dos, il s'empresse de faire ce que vous lui avez maintes fois interdit de faire. Vous l'engueulez ? Ha, ha, ha ! Il se taille dans un coin tranquille (dessous de meuble, haut du cerisier, jardin du voisin) jusqu'à l'heure de la gamelle. Là, il revient peinard, ronron devant, yeux doux, en espérant que vous avez oublié. Vous avez le temps de penser à autre chose. Le chat ne fait jamais ses conneries juste avant l'heure de la gamelle. Il fait ça après. Comme ça il se barre dans un coin tranquille pour digérer (en piquant un roupillon).

Le chat ne sert à rien.
Ce paresseux est supposé chasser les souris. Comme vous avez assez bon cœur pour le nourrir, il n'est pas très motivé. Mais de temps en temps, pour s'amuser, il en attrape quelques-unes et vient les éventrer devant votre porte de service (vous mettrez invariablement le pied sur le cadavre écartelé, si vous n'êtes pas attentif). Il ne les mange pas. C'est moins bon que ses boîtes ou ses croquettes. Et puis, il n'a pas faim. Il joue. Et pour vous remercier de le nourrir, il fait sa boucherie devant votre porte et vous laisse la tripaille en cadeau. Charmant !
Non, ce n'est pas Minet qui éliminera les souris. Sa présence va les éloigner, plus que probablement, mais guère plus.
Un chat, ce n'est pas comme un chien. Heureusement. Parce qu'un chien, vous êtes responsable de ses conneries. Il faut le surveiller, l'attacher, l'enfermer, l'empêcher d'aboyer pendant des heures, ramasser ses crottes... Et s'il fait du dégât dans le quartier, on vous présentera la facture.
Mais si votre matou s'en va zigouiller un pigeon de concours dans le voisinage, vous n'en serez pas tenu officiellement pour responsable. On n'exigera pas officiellement des dédommagements. Mais il est possible aussi que le colombophile frustré s'inscrive dans un club de tir. Vous voilà averti.

Le chat est racoleur.
Le chat a un tempérament de putain. Il racole. Les frotte-frotte et les ronrons sont ses armes favorites. Tout petit, déjà, le chat est craquant. Quoi de plus craquant qu'un chaton ? Deux chatons, je sais, elle est facile. Mais c'est vrai : le petit de cet animal est photogénique. Dans le genre, aucun ne lui arrive à la cheville. En plus, les chatons sont rigolos. On leur pardonne tout, ou presque.
Grave erreur. L'éducation, c'est tout petit qu'on la fait : on ne joue pas avec les doigts des gens, on ne saute pas toutes griffes dehors sur le divan de cuir, on ne se vautre pas sur les lits, on fait pipi-caca dehors...
Avez-vous déjà vu une chatte en chaleur ? Non, pas la fille de la voisine ! Je parle de l'animal : une chatte en période de rut. Avez-vous déjà admiré ce genre de s****e ? Et vas-y que je minaude, et vas-y que je pissouille partout pour attirer les matous... Et que font-ils, les Félix, Grosminet et autres Raminagrobis ? Ils se battent pour obtenir les faveurs de la belle. Et quelles faveurs ! On y reviendra.
Voyons d'abord comment ils se battent, ces courageux quadrupèdes velus. Ils font du bruit, oui. De temps en temps un coup de patte, ça oui. Mais rien de plus. Faut pas trop se fatiguer. Et puis, les blessures, ça fait mal et ça s'infecte ; alors, non merci ! Les bagarres de matous, c'est de l'esbroufe. Entre deux miaulements, on médite. On s'observe. Et puis on regarde ailleurs. On fait semblant de sniffer quelque chose par terre. Et puis on se tire presque sans combattre. Celui qui convainc la belle, par contre...
La voilà qui se roule par terre pour aguicher l'élu. Mais dès qu'il s'approche, c'est coups de griffes et feulements courroucés : « Je ne suis pas celle que vous croyez ! »
S****e, oui ! Toutes les mêmes !


Alors, pourquoi choisir un chat ? Et pourquoi même vouloir d'un chat à la maison ?
Je ne sais pas pourquoi, vraiment, mais chez moi il y a toujours eu un chat. Ou plusieurs.
Par contre, j'ai appris une chose : on ne choisit pas un chat. Il ne faut jamais choisir un chat. Le chat que vous choisirez sera le pire emmerdeur dont la planète féline vous a jamais fait subir la présence.
Le meilleur des chats (le plus affectueux, le moins désobéissant, le plus sympa, le moins ingrat...), c'est celui qui vous choisit. Pas celui que vous choisissez.
Si vous allez au refuge, chez un marchand, chez des amis ou chez qui vous voulez pour adopter ou acheter un chat, suivez ce sage conseil : ne choisissez pas de chat. Ne prenez pas le plus beau, le plus laid, le plus gros, le plus petit, le plus rigolo, le dernier disponible, le plus cher, le plus timide, le plus ceci ou le moins cela. Non. Laissez le chat vous choisir. Et s'il ne va pas vers vous, passez votre chemin.
Le meilleur chat, ce n'est pas cette petite boule de poils craquante, adorable, qu'un marchand vous met dans les bras ou dont quelque connaissance cherche à se défaire. Le meilleur chat, c'est celui qui vient de nulle part. Le pauvre minable maigrichon qui échoue dans votre jardin et qui vient vers vous avec dans les yeux cette simple supplique : « adopte-moi ». Ou alors ce chat qui attend derrière un grillage, dans un refuge, avec plusieurs de ses congénères, et qui vient vers vous en vous jetant un regard suppliant, en vous tendant la joue à gratter entre les fils galvanisés.

Moi, j'aime les chats, ces paresseux, ces inutiles, ces désobéissants, ces racoleurs. Au fond, j'aime bien les chats parce que j'aime bien les gens. Ils se ressemblent tellement !

2 commentaires:

  1. Quand j'étais ado on avait un chat. Un putain de cas social. Il chassait les chiens.
    J'ai toujours dit que s'il avait fait deux mètres de haut, ce chat, il nous aurait tous bouffés, ma famille et moi. j'en mets ma main à couper. et puis après il aurait miaulé et il aurait pas compris pourquoi il aurait pas eu ses pâtés (de marque, attention, comme de par hasard ce chat ne mangeait pas les pâtés ou croquettes à bas prix...)

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  2. C'est terrible, ces bestiaux. Et encore, je n'ai pas parlé de celui qui ne supporte pas qu'on soit dans le fauteuil à lire le journal. Terrible ! Bien sûr, il est possible de lui balancer un coup dudit journal. Là, ça le vexe, l'animal ! J'ai remarqué qu'on peut vexer facilement un chat. Parfois, il suffit seulement de le regarder et de rigoler de sa fiole. Les chats, c'est un peu comme les gens, à certains moments : le confort, la bouffe, le repos ; surtout pas d'ordres et faites pas chier avec des exigences et des réglements à la noix.

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